Cuisiner à l’âge du Bronze en mer d’Iroise : le contenu des poteries révélé par les analyses lipidiques

Résultat scientifique Ecologie et environnement

Le site de Beg ar Loued sur l’île de Molène (Finistère, France) permet, pour la première fois sur la façade atlantique européenne, de documenter les pratiques culinaires de la fin du Néolithique et du début de l’âge du Bronze grâce à la bonne conservation des lipides piégés dans les parois poreuses des céramiques. À l’aide de la combinaison d’approches moléculaires et isotopiques, ces travaux dévoilent les choix effectués dans la préparation et la consommation des aliments. Il en ressort que les ressources terrestres sont préparées dans les céramiques alors que les produits de la mer sont traités différemment. L’article est publié dans les Comptes Rendus Palevol. Ces travaux impliquent notamment des scientifiques du Centre de recherche en archéologie, archéosciences, histoire  (CReAAH, CNRS/Le Mans Univ./Ministère de la Culture/Nantes Univ./Univ. Rennes/Univ. Rennes 2) et du Littoral, Environnement, Télédétection, Géomatique (LETG, CNRS/Nantes Univ./Univ. Bretagne Occidentale/Univ. Rennes 2).

Les stratégies de subsistance des premières communautés agro-pastorales ont été mises en évidence depuis le début du Néolithique grâce à de nombreuses études sur les résidus lipidiques des récipients en céramique menées dans diverses parties de l'Europe continentale. En revanche, très peu de données sont disponibles pour la fin du Néolithique et le début de l’âge du Bronze sur la façade atlantique, en particulier en contexte insulaire. Les analyses moléculaires et isotopiques menées sur plus de 150 échantillons de céramiques du site de Beg ar Loued ont permis d’appréhender les pratiques culinaires des populations de la fin du Néolithique et du début de l’âge du Bronze peuplant l’île de Molène (Finistère). Les travaux ont été menés par un collectif impliquant plusieurs laboratoires du CNRS en lien avec des universités et organismes de recherche français ainsi que la société d’archéologie préventive EVEHA et plusieurs institutions en Espagne et en Angleterre, et ils sont publiés dans les Comptes Rendus Palevol.

Les résultats obtenus montrent l’excellente préservation des lipides dans les céramiques, ce qui a permis d’identifier la nature des denrées préparées et consommées. Ces dernières sont caractérisées par une écrasante majorité de produits animaux terrestres issus de l’élevage, principalement des produits laitiers de petits ruminants dont la viande était également consommée. Étonnamment, les céramiques n’étaient pas ou très peu utilisées pour la préparation ou la consommation de produits de la mer dont on sait, par les vestiges fauniques (restes de poissons et de coquillages), qu’ils étaient aussi largement exploités. Ces résultats mettent donc en lumière des pratiques culinaires spécifiques avec des poteries dont l’usage est dédié principalement à certaines denrées. En outre, des graisses animales et des cires ont été identifiées dans les couches superficielles de certains récipients, démontrant l’application de techniques spécifiques de finition incorporant plusieurs types de substances grasses. Ces recherches sont maintenant amenées à s’étendre à d’autres sites insulaires et continentaux de la façade atlantique afin de mieux cerner les habitudes alimentaires, les pratiques culinaires et les choix culturels mis en jeu par les populations néolithiques et de l’âge du Bronze ainsi que leur évolution au cours du temps.

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